Nicobdx

"Cela va vraiment mal quand vous commencez à ressembler à votre photo d'identité", Anonyme

Louvain-la-même

    A Louvain-la-neuve, on parle de bières, de soirées et de cercles.
Les cercles se sont des salles où passe de la musique commerciale pour tous ceux qui aiment chanter les paroles sans en comprendre le sens. On se fait vomir dessus et on contemple avec dégoût des « hommes » et des « femmes » qui se pavanent sur des murs remplis de pisse. On s'y bouscule, on reçoit de la bière dans les cheveux et on se décase vite si le mot « principe » ne nous passe pas par la tête à ce moment là.
On est bourré, alors on (nous) pardonne tout. Mais si vous y allez en n'ayant bu qu'une seule bière, le monde vous paraîtra être une grande jungle peuplée de singes sans raison.

    On ne cherche pas à diversifier ses soirées, cela demanderait trop de réflexion. On sort en cercle, un point c'est tout. Et lorsque pendant le repas quelqu'un lance « Eh les gars, on va en cercle ? », il y a comme une douce impression que c'est une idée venue de nulle part, une nouvelle révélation que personne n'avait jamais faite. Tout le monde crie ô joie ô bonheur, une nouvelle soirée s'annonce ! Comme si on attendait que quelqu'un lance cette parole miraculeuse, celle qui sauve le peuple de l'ennui.
Des jeunes recommencent, avec une motivation infinie, les mêmes soirées. Et pourtant, le temps passe.

    Une soirée originale se prépare lorsqu'on sort au théâtre, car peu connaissent autre chose que leur petite salle puante. Alors la sortie théâtre, c'est comme le premier vol au-dessus de l'Atlantique, ça change de la routine et ça impressionne. « Quoi, tu as été au théâtre ? C'était à Louvain au moins ? ».
De toute façon, après le théâtre on propose toujours de sortir en cercle. Ça tourne en rond.

    On parle aussi parfois de cours. Ici, on croise tout le temps les mêmes gens. Et même si on ne les connaît pas, c'est socialement correct d'aller leur dire bonjour. Mais les conversations s'épuisent vite quand on parle au copain de la copine de la fille qui a cours avec moi.
Les deux questions qui reviennent le plus souvent sont « Tu finis quand ? » et « Tu pars au ski ? ». Alors que ce type que je n'ai vu qu'une fois se fout de la date à laquelle je finis mes examens, il ne fera de toute façon pas de soirée avec moi. Et il se fout d'autant plus si je pars au ski. « Oui je pars au ski ». Une information inutile en plus dans son cerveau qu'il va de toute façon vite oublier car il me posera la même question la prochaine fois qu'il me verra.

    Serait-ce pour combattre l'ennui et la solitude que les étudiants ici organisent tout le temps les mêmes soirées ? A défaut d'avoir quelque chose à faire, autant prendre ce qui vient, même si la soirée promet de prendre le même chemin que les autres. L'habitude peut paraître confortable.

    On ne cherche pas l'expérience en venant ici. On ne fait que l'éviter.

Louvain-la-même

Critique de la ville étudiante de Louvain-la-Neuve (Belgique).

Publié dans l'Etincelle (le journal des étudiants de Louvain-la-Neuve) en février 2010

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